La sortie sur Netflix du documentaire sur Cantat a été pour les plus jeunes, la découverte de l’affaire mais pour d’autres (dont les autrices du documentaire) d’une réécriture dépolitisée et bien pratique de ce qu’il s’est dit et passé en 2003.

Pour vous expliquer comment l’affaire Cantat a été reçue en 2003, il faut expliquer ce qu’est l’Internet de l’époque et où sont les féministes. Il n’existe évidemment pas de réseaux sociaux et nos moyens de discussion sont essentiellement les forums. Vous ne discutez pas à partir de votre téléphone mais uniquement d’un ordinateur. On parle des droits des femmes, une fois par an, le 8 mars, où les media nous font l’aumône d’une petite interview. Parfois lorsque je n’ai pas le moral, je me rappelle qu’il n’y a pas un jour désormais où on ne parle pas de féminisme. Ca me fait prendre conscience du chemin parcouru. Aujourd’hui imaginons que je poste un twit sur le féminisme. Il sera vu par mes followers. Avec les algorithmes, il sera proposé à des gens qui ne me suivent pas. Si des gens me répondent, il sera vu par les gens qui suivent celleux qui m’ont répondu. Avec les qrt, il sera vu par encore plus de monde. Bref, assez facilement, un propos féministe peut être vu par beaucoup de monde. C’est beaucoup plus facile d’être vue et lue, et de voir et lire des opinions féministes.

En 2003, cela n’est pas le cas. soit quelqu’un fait l’effort de venir lire un forum féministe, soit nous devons aller sur des forums non féministes (avec ce que cela implique en termes de violence). A l’époque, un moyen important de communication est les forums de discussion des media. J’en parle avec facilité puisque je les modère à l’époque. Imaginons que vous vouliez réagir à un article sur la mort de Marie Trintignant. Vous ne pouvez pas encore réagir sous l’article donc vous devez aller sur les forums du media. Puis vous cherchez le forum consacré à l’actualité française, vous cherchez ensuite si un fil a été dédié au sujet et vous postez votre réaction. Dans un forum où il n’y a pas de féministes. Vous allez au casse-pipe.

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